Maurice Farina: mime, archivist and collector (1883-1943)
Maurice Farina : mime, archiviste et collectionneur (1883-1943)
Résumé
The Performing Arts Department of the Bibliothèque nationale de France boasts a collection that has yet to be fully explored: that assembled in the first decades of the 20th century by the mime Farina, whose real name was Jules-Maurice Chevalier. As the archivist of his own activity, Farina offers us an ambitious account of his career, bringing together a whole range of documents about himself: correspondence, programs, articles, manuscripts, models of sets and costumes... These archives are complemented by a vast collection, which sheds light on the various issues crystallizing around the art of gesture at the beginning of the century.
Since the demolition of Les Funambules in 1862, the theater where the whole of Paris in the 1830s ran to see Jean-Gaspard Deburau, the famous "Baptiste" later immortalized on screen by Jean-Louis Barrault in Les enfants du Paradis, the art of silence had suffered a major eclipse. At the end of the 19th century, the Cercle funambulesque had brought it a certain revival, and the Hanlon-Lees brothers, English mimes and acrobats who amazed both Zola and Huysmans, had achieved triumphant success. But in the first decades of the 20th century, long before the revolution initiated by Étienne Decroux, founder of the new "gestural grammar" known as mime corporel and teacher of the famous Marcel Marceau, no mime has gone down in history.
At the time, pantomime was confined to the world of music halls, where it sometimes compromised with the very first stripteases, and struggled to defend its place on the artistic scene. At a time when many librettists, choreographers, visual artists and dancers are striving to make dance a profoundly renewed art form, classical pantomime seems obsolete. New theoretical thinking promoting the liberation of the body and the search for natural movement also ran counter to the codified, conventional gestures still practiced by many mimes. On the other hand, the growing success of the cinematograph was jeopardizing pantomime performances, and revealing how much pantomime could be perceived as an unfinished genre.
Driven by a passion for his art, and driven by the need to respond to the decline of pantomime by accumulating evidence of its practice, Farina worked throughout his career to assemble this very rich collection. From 1928 onwards, when he was no longer able to perform on stage for health reasons, he decided to put it together with his archives, bequeathing the whole to his country's heritage.
Our study aims to show how Farina undertook and pursued his work as an archivist and collector, a veritable plea for the art of silence to which he had dedicated his life.
Le département des Arts du spectacle de la Bibliothèque nationale de France dispose d’un fonds encore mal exploré : celui rassemblé dans les premières décennies du xxe siècle par le mime Farina, Jules-Maurice Chevalier de son vrai nom. Se faisant l’archiviste de sa propre activité, Farina nous offre un ambitieux témoignage sur sa carrière, réunissant tout un ensemble de documents à son sujet : correspondance, programmes, articles, manuscrits, maquettes de décors et de costumes… À ces archives s’ajoute une vaste collection, qui met en lumière les différents enjeux se cristallisant autour de l’art du geste en ce début de siècle.
Depuis la démolition des Funambules en 1862, théâtre où le tout-Paris des années 1830 courait voir Jean-Gaspard Deburau, le fameux « Baptiste » immortalisé plus tard à l’écran par Jean-Louis Barrault dans Les enfants du Paradis, l’art du silence subissait une éclipse importante. À la fin du xixe siècle, le Cercle funambulesque lui avait pourtant apporté un certain renouveau, et les frères Hanlon-Lees, mimes et acrobates anglais qui émerveillaient à la fois Zola et Huysmans, avaient obtenu un succès triomphal. Mais pour ce qui est des premières décennies du xxe siècle, bien avant la révolution initiée par Étienne Decroux, fondateur de cette nouvelle « grammaire gestuelle » qu’est le mime corporel, et professeur du célèbre Marcel Marceau, on ne trouve aucun nom de mime qui soit passé à la postérité.
À cette époque, en effet, cantonnée dans l’univers des music-halls où elle se compromet parfois avec les tout premiers strip-tease, la pantomime a bien du mal à défendre sa place sur la scène artistique. À l’heure où de nombreux librettistes, chorégraphes, plasticiens et danseurs s’attachent à faire de la danse un art profondément renouvelé, la pantomime classique paraît désuette. Les nouvelles réflexions théoriques qui promeuvent la libération du corps et la recherche du mouvement naturel vont aussi à l’encontre de la gestuelle codifiée et conventionnelle que pratiquent encore de nombreux mimes. D’autre part, le succès croissant du cinématographe met en péril les représentations de pantomime, et révèle combien elle peut être perçue comme un genre inabouti.
Habité par la passion de son art, et poussé par le besoin de réagir au déclin de la pantomime en accumulant des témoignages sur sa pratique, Farina s’est employé, durant toute sa carrière, à rassembler cette très riche collection. À partir de 1928, date à laquelle il ne peut plus monter sur scène pour raisons de santé, il décide de la mettre en forme avec ses archives, et de léguer l’ensemble au patrimoine de son pays.
Notre étude se propose de montrer de quelle façon Farina a entrepris et poursuivi cette démarche d’archiviste et de collectionneur, véritable plaidoyer en faveur de cet art du silence auquel il avait voué sa vie.
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